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Bulletin de Partage 2 - Des modes de consommation renouvelés, une mobilisation créative...

Cette période est marquée par une stabilisation des pratiques, en particulier à l’échelon des foyers et en proximité. Les consommateurs et les maires apparaissent comme les chevilles ouvrières de solutions créatives pour articuler les différents maillons de la chaîne alimentaire. Après une phase de turbulence suscitée par la suppression des marchés au niveau national le 24 mars puis par la mise en œuvre de dérogations par les maires, élus et consommateurs se mobilisent pour soutenir ou créer des modes de distribution renouvelés des produits de l’agriculture locale.


 

Cette seconde période est marquée par une forte majorité de témoignages de consommateurs, qui exposent comment s’organisent leurs approvisionnements et la composition de leurs repas durant le confinement. Tout en faisant état d’efforts constants d’adaptation et de réflexions sur leurs choix, ils expriment aussi l’établissement de nouveaux repères et d’une certaine stabilité.


A travers ces témoignages se dégagent plusieurs stratégies :

  • Celle du repli dans le confinement, avec des efforts qui portent sur la minimisation (voire l’annulation pour quelques-uns !) des déplacements pour s’approvisionner, on cuisine les stocks, le contenu du congélateur ou des placards, on produit dans son jardin, on cueille. Des ruptures de certains produits comme la farine témoignent de nouvelles habitudes culinaires (faire son pain, des gâteaux…);

  • Des stratégies de solidarité avec les producteurs locaux, couplées avec la recherche domestique de produits frais, sains, variés et agréables pour compenser le confinement par les plaisirs de la cuisine et de la table. Il s’agit alors souvent aussi d’éviter dès que possible le supermarché en raison à la fois du risque de contamination perçu comme accru, de choix éthiques, et de la possibilité qu’offre la vente directe à la ferme de “prendre l’air” (occasion de sortie et moindre risque perçu de contamination) ;

  • Enfin, des modes de consommation restés assez constants avant et pendant le confinement : il s’agit surtout de consommateurs en circuits courts, habitués à deux ou trois lieux de distribution qui restent ouverts et approvisionnés en durant le confinement. Ils ont tendance à augmenter leurs approvisionnements notamment les familles avec des repas plus nombreux.

La notion d’alimentation locale, jusque-là surtout entendue pour les produits d’origine locale, s’étend aux modalités de distribution les plus proches du domicile. Pour limiter les contaminations, on se déplace peu, on achète au plus près.

La période a été significativement marquée par l’annonce le 27 mars par le 1er ministre Edouard Philippe de la suppression des marchés de plein vent, qui a immédiatement déclenchée de nombreuses réactions. Celles-ci viennent à la fois des consommateurs, qui s’inquiètent des possibilités de s’approvisionner en produits frais qu’ils privilégient, et des risques économiques encourus par les producteurs. Ces derniers proposent de leur côté des témoignages sur les solutions variées qu’ils expérimentent dès la fermeture des marchés pour réorganiser leurs débouchés, témoignages renforcés par ceux de citoyens mobilisés à leurs côtés pour assurer des relais informels mais structurés sur le terrain.


Le début de la période est fortement marqué par les incertitudes et l’inquiétude sur les solutions de vente directe et de circuits courts autorisées ou interdites.


Ce premier état de tension cède cependant la place au cours de la quinzaine à l’émergence d’initiatives favorables au maintien de ces débouchés, cependant souvent au prix de réorganisations importantes des systèmes de distribution ou par la création de nouveaux dispositifs.

En parallèle, les maires sont alertés sur la nécessité de produire des dérogations pour le maintien de certains marchés. Des témoignages s’accumulent progressivement sur le nombre et le type de marchés rétablis par les maires et sur le type de précautions sanitaires qui les accompagnent. Le rôle des maires a été explicitement cité 18 fois dans les témoignages reçus au cours de cette seconde période, contre 4 fois pour la précédente. Au-delà des marchés, le rôle des mairies se révèle décisif pour définir (sous réserve d’accord du préfet, avec des concertations parfois tendues) des règles de sécurisation sanitaire des marchés maintenus (mais souvent très contraints). Ils autorisent également par compensation de nouveaux points de livraisons de paniers : la notion de “drive” se popularise et s’étend désormais à ces solutions locales. Les systèmes de commandes et livraisons de paniers fermiers sont non seulement sur-sollicités pour ceux qui existaient, mais se démultiplient en improvisant une organisation alternative aux marchés à partir du réseau des clients habitués.


Une attention particulière est prise pour garantir des mesures sanitaires. « Des masques en tissu ont été fabriqués par une couturière pour les bénévoles de Voisins de paniers et la mairie a fait une attestation pour garantir les barrières sanitaires durant les permanences de distribution de panier près de locaux municipaux» témoigne un consommateur (27 mars, Bretagne). La mise en œuvre de ces systèmes émergents repose significativement sur des énergies citoyennes formelles, comme des associations, ou informelles comme des consommateurs habitués mais aussi parfois novices qui s’engagent et mobilisent leurs voisins et leur entourage.


Cette période marque ainsi une implication significative et variée des consommateurs dans l’organisation de l’approvisionnement au-delà de citoyens déjà engagés. Des coopérations entre habitants d’un même quartier se développent, avec des transferts entre formes de circuit court (du marché vers les paniers…). Nous observons également des mouvements pragmatiques vers les circuits de commercialisation plus classiques pour limiter les sorties et les files d’attente parfois longues dans les magasins bio ou de proximité.


Les acteurs des chaînes longues de distribution s’interrogent sur l’optimisation de la logistique (par exemple lorsque les camions reviennent à vide) et sur la prise en charge de ce surcoût. Des difficultés économiques apparaissent dans certaines productions comme les produits laitiers, des fruits comme les fraises et légumes comme les asperges. Les grandes surfaces s’affichent comme des solutions pour soutenir les grossistes et les producteurs.


La seconde moitié de cette quinzaine est marquée par une entrée en scène progressive des régions et des organisations agricoles qui se mobilisent ensemble pour faciliter ces mises en relation entre producteurs et consommateurs dans la proximité.


Il émerge un foisonnement d’initiatives institutionnelles (plateforme internet, cartes interactives...), pour le moment assez peu coordonnées, qui témoignent de l’importance accordée à l’approvisionnement local. La plateforme de géolocalisation de la Région Nouvelle Aquitaine, qui permet de mettre en lien producteurs et consommateurs de proximité, a été rapidement imitée par d’autres régions et signale des dynamiques publiques émergentes.



 


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